vendredi 28 septembre 2007

Mourir de voir mourir

La mort... cette fin de parcours... ce moment ultime où la vie arrive à son terme...

Dernier soupir, dernières paroles, derniers râles...

La peur de la mort... trop souvent apparentée à l'effroi ressenti devant la simple idée de douleur physique...

Mourir... ou vivre la mort d'autrui... sans cesse... nuit après nuit...

Assister à la dégradation d'un être devenu cher parce qu'ayant partagé notre vie professionnelle durant des mois; des années...

Laver... panser... soigner le corps et l'âme... consoler de l'absence d'une famille unie...

Tenter, sans vraiment y parvenir, de donner des sourires, du temps... à ceux qui en ont besoin dans leur souffrance solitaire sans espoir d'amélioration...

Puis, après avoir veillé cette personne tout ce temps... s'apercevoir qu'elle est partie durant un des moments trop fréquents durant lesquels nous n'étions pas à son chevet... et, sans trop prendre le temps de digérer tout ça, saisir le téléphone et aviser ses proches... retourner avant l'arrivée de la famille laver, changer, coiffer un corps sans vie qu'une heure auparavant on entendait encore respirer...

Assister à l'arrivée des pompes funèbres... entendre les remarques désobligeantes, les blagues grossières suivies d'un clin d'oeil nous étant adressé... complices d'une insensibilité que nous ne ressentons pas... puisque nous avons connu et apprécié la personne dont la carcasse est sans ménagement roulée dans un drap et balancée sur une civière...

Et tranquillement, à mesure que le temps passe et que ce genre de situation se répète... se forger une carapace d'indifférence compatissante... afin d'arriver à vivre une vie normale en-dehors du boulot... pour ne plus rester des heures dans notre lit, les yeux ouverts devant l'ampleur de ce qui nous dépasse... et rester aidante... sympathique plutôt qu'empathique...

Maintenant... après plusieurs années d'arrêt... et la perspective de retourner au Québec et donc de repratiquer... j'y pense très souvent, me demandant si j'aurais la force de recommencer à faire ce travail... Et la réponse est "non"... Pas de cette façon... je préfère avoir peur de la mort et de la souffrance... je suis très empathique; même trop... mais je préfère ça à la lutte contre moi-même que j'ai dû mener afin de bien faire mon métier...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire